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Présentation de Rémi Guerrin
Interview réalisée par Guillaume Bouvy
Remi Guerrin est photographe. Entre expérience continuelle de l’étonnement à travers ses créations, il a choisi comme support l’argentique, qui nécessite de prendre du temps, être patient et sollicite davantage les sens. Le récit de vie est le fil rouge de sa résidence.
Quelle est la démarche artistique de cette résidence ?
« Je change selon les structures. J’essaie de donner une dynamique différente et amener des pistes différentes. Par exemple à l’école Suzanne Lannoy-Blin à Louvroil, j’ai proposé de travailler sur le territoire et sur le regard que l’on peut porter sur une parcelle et un quartier. Nous avons fabriqué sept sténopés, que nous avons baptisé Jeumont, 51 minutes d’arrêt, en référence à la nouvelle de Georges Simenon. C’était aussi un clin d’œil par rapport au temps de pause et pour permettre aux enseignants de travailler sur le texte en classe. Les prises de vue ont été réalisées dans la cour de récréation et à l’intérieur, et les élèves ont pu effectuer le développement. À l’école Corneille à Maubeuge, j’ai proposé deux journées complètes sur la thématique du récit de vie. J’ai demandé aux élèves de ramener un objet. Grâce à l’Agglomération, deux studios avaient été installés, avec un éclairage complet, un sténopé et un laboratoire. Cinq classes ont pu profiter de l’atelier. En binôme, et après avoir vu chaque classe une heure avant, les élèves ont pu comprendre le processus, qui n’est pas trop technique. Le temps de pause était entre 4 et 6 minutes. Les photos étaient des portraits sans visage, parfois sans présence. »
Comment les élèves ont-il appréhendé les ateliers ?
«Le processus est simple, il comprend une plaque argentique, de la lumière qui passe à travers la chambre et un révélateur chimique. Les élèves étaient curieux, ils étaient dans la découverte. Je ne suis pas certain que tous aient fait le rapprochement entre les photos d’un téléphone portable et le sténopé, eux qui n’ont pas connu l’argentique. »
Pourquoi avoir postulé à cette résidence ?
« Les résidences sont importantes, j’en ai déjà fait plusieurs. Il s’agit de créations qu’on ne ferait pas ailleurs. C’est aussi le partage de cette création, qu’on ne fait pas seul. Cela se met en œuvre avec les adultes, les collégiens et les lycéens, dans une dynamique de groupe. »
Les résidences sont importantes, j’en ai déjà fait plusieurs. Il s’agit de créations qu’on ne ferait pas ailleurs.
Comment allez-vous poursuivre la résidence avec la fermeture des établissements et le confinement ?
« Ici la photographie numérique tombe très bien. Cela permet de faire les choses à distance. Il y a notamment un projet qui devrait être réalisé avec l’association Mots et Merveilles (qui lutte contre l’illettrisme) avec les apprenants et les enseignants. Ils seront mis en binômes pour qu’ils montrent leur quotidien, leur intérieur et leur vie. Je pourrai ensuite en sortir un négatif à partir des fichiers qu’ils m’enverront. Il faut qu’on improvise. »
Comment vous êtes-vous informé depuis l’apparition du COVID-19 ?
« Début janvier, quand j’ai vu les premières annonces, je me suis dit que s’il y avait un confinement en Chine c’était grave. Pour avoir vécu plusieurs mois au Vietnam et être habitué à ce genre de situation, je n’ai pas compris pourquoi en Occident on ne prenait pas au sérieux le virus. Je me rendais sur les sites de Libération, du Figaro, Le Monde et L’Humanité. Je ne suis pas très représentatif : j’ai un compte Facebook mais je ne l’utilise pratiquement pas. Je suis plus tourné vers l’image, je suis donc plus sur Instagram. »
« Pour avoir vécu plusieurs mois au Vietnam et être habitué à ce genre de situation, je n’ai pas compris pourquoi en Occident on ne prenait pas au sérieux le virus »
En tant qu’artiste, quelle est votre perception de la crise sanitaire que nous traversons ?
« En allant faire les courses j’ai vu chaque personne s’éloigner pour respecter le confinement. Du jour au lendemain on est devenu des pestiférés. C’est un peu inquiétant pour l’après confinement, comment les personnes vont s’adapter ? En tant qu’artiste et en tant que photographe, il y a le manque de pouvoir sortir pour prendre des photos, avec cette sensation de prise de risque constante. Je pense que la crise renvoie à la peur de la mort. On la refuse et on utilise des euphémismes, comme le fait de dire qu’on part. »
Les publications de Rémi Guerrin
Exercice photographique : Récit de vie d’un confinement (PDF)
Projet en cours avec le collège Saint-Exupéry de Hautmont
Sténopé argentique 13X18cm – Récit de vie, récit d’un objet
Par l’école Corneille de Maubeuge
Pour aller plus loin :
Voir son site : https://www.remiguerrin.com/
Voir sa page Instagram : https://www.instagram.com/remiguerrin/